Cleo Esterhazy (Taylor Marie Hill)

Protégée par mon oncle et un ami de papa, je courrais vers la voiture où je me réfugiais, me cachant directement dans les bras de Padma tout en me bouchant les oreilles. Ca ne servait à rien, je pouvais encore les entendre ces foutus journalistes qui ne nous laissaient aucune vie privée, pas même aujourd'hui alors que nous étions sur le point d'enterrer notre père. J'entendais vaguement ma tante donner l'ordre de démarrer et ne me redressais qu'après cinq bonne minutes, lorsque j'étais assurée que plus personne ne nous suivait. Mon père avait perdu la vie quatre jour plus tôt dans un accident d'avion, appareil appartenant à sa propre compagnie. Depuis l'annonce, les journalistes n'avaient pas quitté notre porte. Arrivés à l'église, je glissais mes doigts dans ceux de Kasim et sortais de la voiture la tête haute, foudroyant du regard la moindre personne présente qui n'avait rien à faire là. Je n'avais qu'une envie, c'était fermer les yeux, courir à l'intérieur, mais c'était l'honneur de mon père que je défendais et quoi qu'il puisse se dire à son sujet, je le défendrais toujours.

« Kaz je t'en supplie. » En larmes, je suppliais mon frère de ne pas m'abandonner. Pas ici, pas seule avec une mère qui détestait mon père défunt. J'avais tout perdu au cours de ces derniers mois : mon père, ma soeur ainée qui avais mis fin à ses jours, notre maison. Nous étions passé de l'école privée huppée à l'école publique, d'une villa à une maison qui tenait à peine debout. La plupart de mes 'amis' m'avaient tourné le dos, il était hors de question que je le perde lui aussi. Kasim et ma petite soeurs étaient mes derniers repères, les dernières personnes sur qui je pouvais m'appuyer. Bien sûr maman essayait de nous soutenir mais à sa façon, en rabaissant mon père, en nous rappelant que si nous en étions là aujourd'hui, c'était par sa faute. Mes supplications ne suffisaient pourtant pas à le retenir et quelques jours plus tard, mon frère mettait les voiles. Me laissant avec une mère haineuse et instable, une petite soeur encore trop jeune pour ne pas boire ses paroles, et rien.
 

« Il t’a abandonné Cleo ! Il en a rien à faire de toi, à la seconde ou il a eut l’occasion de déguerpir, il l’a fait sans se soucier de c’que t’allais faire sans lui. » Je tournais la tête vers Liam que je fusillais du regard, bien qu’un voile commençait à se former devant mes yeux. « Tu sais que j’ai raison! Il ne mérite pas que tu plaques tout pour lui. » J’inspirais profondément, essayant de ne pas m’emporter. Il avait raison sur toute la ligne, ça ne lui donnait pas le droit de prendre cette décision à ma place. « J’le fais pour moi, pas pour lui! Ca fait trois ans que je décompte les jours et tu l’savais très bien, dés le début. » Avant même que nous nous mettions en couple, je l’avais averti de mon envie - mon besoin - de mettre les voiles. Quitter Phoenix, rejoindre mon frère et repartir à zéro, loin de cette vie qui m’étouffait. Loin de cette maison dans laquelle je pouvais encore voir mon père se balader, lire le journal, dans laquelle ma mère sombrait jour après jour depuis trois ans maintenant. Liam avait toujours su qu’à mes dix-huit ans, je m’envolerais vers San Francisco pour rejoindre mon frère. Oui Kasim s’était fait la malle. Oui je l’avais détesté pour m’avoir abandonné, y’avait pas le moindre doute à ce sujet. Je lui en voulais encore pour chaque jour passé loin de lui, coincée dans cette spirale de laquelle je ne parvenais pas à sortir mais j’aurais sans doute fait pareil à sa place. Pas une seconde je n’aurais hésité si on m’avait laissé le choix de foutre le camps d’ici. La preuve, j’allais mettre les voiles dans quelques jours sans me soucier de notre cadette qui serait à présent seule avec maman. Sans me soucier de Liam, la seule personne qui m'avait soutenue jour après jour depuis le drame qui avait frappé notre famille. Il avait d'abord été le meilleur ami de Kasim, celui que je connaissais depuis que j'étais haute comme trois pommes,. Puis il avait quelque peu pris sa place lorsque je m'étais retrouvée seule... avant de devenir mon repère, mon petit ami. « Ma vie est ici Clé. » Il m’annonçait ça en baissant la tête, comme s’il s’agissait d’une révélation plutôt difficile à avouer. Sauf que j’en étais consciente, qu’à aucun moment je n’avais voulu qu’il me suive - je ne lui avais d’ailleurs jamais proposé. « Et la mienne le plus loin possible de Phoenix. » J’inspirais et tournais les talons pour rentrer chez moi, sans le moindre regard en arrière. J’avais peur que si je nous accordais des adieux, j’allais revenir sur ma décision car aussi froide que je pouvais paraître, je l’aimais. Je savais qu’il était capable de me faire changer d’avis et refusais que cela arrive. San Francisco m’attendait.  

J'emballais mes dernières affaires dans des cartons, partagée entre l'excitation et la peur de complètement me planter. « T'es certaine que ça va aller? » Assis sur mon lit, mon frère m'observait depuis plus de trente minutes, non sans se moquer de mon organisation légendaire. Concrètement, je balançais tout dans les cartons sans prêter attention à ce que je faisais. Je m'étais pourtant jurer de faire un tri mais je n'en avais pas la foi et décidais donc de tout emporter avec moi. « Je suis une grande fille Kaz, je vais survivre. » Je lançais sur un ton faussement exaspéré mais sûre de moi. En vrai, il avait toutes les raisons de s'inquiéter vu mon incapacité à garder un job et économiser. Mais bon, près deux années à vivre à ses crochets, il était maintenant temps de prendre mon envol. J'avais trouvé une colocation et quittais enfin l'appartement de mon frère, dans lequel j'étais supposée rester pour quelques semaines tout au plus lorsque j'étais arrivée à San Francisco. « Tu sais où me trouver. » Concluait-il avant de quitter ma chambre pour me laisser terminer les derniers préparatifs. Oui je le savais, non je ne comptais pas crier au secours. S'il y a bien un chose que je détestais par dessus tout, c'était avoir besoin de l'aide de qui que ce soit... Et malheureusement, Kaz avait fait l'exception à la règle bien trop longtemps. J'allais me démerder pour le payer ce loyer ! Même si je venais littéralement de perdre mon job au Starbucks quelques heures plus tôt. Timing parfait, non?!