Tu reviens de l'entraînement, un sac de sport sous le bras. Tu as pris une bonne douche dans les vestiaires du complexe sportif, tu savais qu'en prenant le métro, tu gênerais quelques narines sensibles si tu te baladais tout transpirant. Tu aimes bien prendre le métro de temps en temps, surtout lorsqu'il fait beau car il y a moins de monde. "Moins", le mot est faible car même sans ça, le lieu est bondé quand tu rentres dans le monstre de fer. Tu te colles sans le vouloir à des gens que tu ne connais pas, espérant ne pas trop gêner, même si la gêne est mutuelle. Heureusement, tu es quelqu'un de câlin et de tactile donc ça te gêne pas plus que ça. Tu jettes un regard vers la droite et tu vois une jeune femme, belle, blonde, le visage sérieux. Quelque chose te gêne dans son visage mais tu ne saurais pas mettre le mot dessus. Le serpent metallique démarre et te transporte de quais en quais pendant quelques minutes. Tu espères à chaque fois qu'il y ait assez de personnes descendant du métro pour être moins serré contre les autres, mais il y a autant de gens qui montent et qui descendent. Ton visage se rive sur la femme à ta droite, son visage, tu sais enfin pourquoi ça te gênait de la regarder. Tu lis dans ses yeux l'inconfort, la gêne. Tu la vois s'agiter brusquement, d'abord tu ne réalises pas pourquoi, t'es pas très malin faut dire. Mais plus tu analyses ses gestes et son comportement, plus tu comprends qu'elle a du mal à gérer le monde qui l'étouffe. Du moins c'est ce que tu penses, tu ne comprends pas ce qu'elle marmonne, tu vois simplement ses lèvres bouger.
Le métro s'arrête soudainement et tu lui prends la main subitement. "Venez, ça va aller, allons prendre l'air." Tu lui dis rapidement sans passer par la case présentation. Vous sortez à la hâte du titan de fer et slalomez entre les personnes jusqu'à trouver un escalier vous menant vers la sortie. Une fois à l'air libre, tu vois le parc pas très loin, tu le reconnais, le Dolores Park, et tu entraînes la jeune femme jusque là bas, au milieu des arbres, de la végétation. Un endroit aéré, au soleil, elle peut désormais respirer. "Est-ce que ça va mieux ?" Tu tentes de prendre contact en évitant de la toucher pour lui laisser son espace vital, qu'elle reprenne d'abord son souffle, qu'elle se calme. "Je m'appelle Pelleas. Vous m'avez fait peur dans le métro, je croyais que vous alliez clamser devant moi." tu lui dis avec un léger accent du sud, un brin paysan. "Vous voulez boire quelque chose ?" Tu lui demandes en voyant un petit kiosque au pied d'un arbre, vendant douceurs et boissons. @Meadow Leiningen
J’étais fatiguée. Très fatiguée. Honnêtement, je crois que je n’avais pas eu d’aussi mauvaise nuit depuis… non. Je crois que la plus mauvaise nuit que j’ai jamais passé était bel et bien celle que je venais de passer. Entre les bruits de la rue, la peur que ça ne devienne trop proche et ces fichus insomnies que je me tapais ces derniers temps, j’étais servie. Mais c’était principalement dû au fait que mon quartier était bruyant, surtout la nuit. J’avais gardé les yeux ouverts et enchainé mes heures au boulot sans broncher. Fort heureusement, j’avais passé ma journée à la réception, à remplir et imprimer des papiers pour x ou y, là haut, dans leurs tours d’argent. Trop fatiguée pour réfléchir après cette dure journée, je m’enfonce dans la bouche de métro, passe ma Clipper Card sur la borne et continue d’arpenter les couloirs de cette ville sous la ville, machinalement. Je m’engouffre dans le BART sans trop me soucier de ce qu’il y a autour de moins, puis m’appuie sur une porte. Fatiguée. Je suis fatiguée. Tellement, que je ne fais plus attention à ce qui m’entoure. Jusqu’à ce que je rouvre les yeux, après l’avoir entendu. Entendu quoi ? Entendu ce fichu éternuement, cette fichue personne à deux centimètres de moi qui avait éternué. Je sentais presque les microbes qui venaient se frotter à moi. Je commence alors à ouvrir mon sac, cherchant mon gel hydroalcoolique. Pas là. Je le voyais, posé sur ma commode, dans mon appartement. Il n’était pas là. À un des moments où j’avais le plus besoin de ce fichu gel, il n’était pas là. « Putain putain putain » je me mets alors à ruminer. Mes mains tremblent petit à petit. Je perds alors le fil du temps, et d’ailleurs j’entends que j’ai déjà passé mon arrêt. Et puis tous ces gens, autour de moi, avec leurs microbes, leurs mains pleines de microbes, sales. Je tape alors des pieds et commence à m’agiter. Je sens le métro qui s’arrête. « Mission » J’entends, de la voix automatisée. Les portes s’ouvrent et on prend ma main. Encore une main pleine de microbe. « Venez, ça va aller, allons prendre l’air. » dit une voix masculine. Je ne prends même pas la peine de lever la tête pour le regarder. Je pourrais très bien être en train de me faire kidnapper mais à l’heure actuelle j’avais l’impression que mon cerveau était sur off. Il me traîne sur 500 ou 600 mètres jusqu’au Dolores Park, dont je reconnais cette grande colline si particulière. « Je m'appelle Pelleas. Vous m'avez fait peur dans le métro, je croyais que vous alliez clamser devant moi. » Je finis enfin par lever la tête. Un jeune homme avec des cheveux aubruns, pas un kidnapper. Je tente de respirer normalement. J’essaye. « Meadow » lui dis-je entre deux halètements. « Vous voulez boire quelque chose ? » « Je… J’ai besoin de me laver les mains… Je… Et de l’eau je crois. Je sais pas. Merci. En tout cas merci. » Je jette alors mon sac par terre et m’étends en bas du parc.
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